Dakar, 8 fév (APS) – Les quotidiens parvenus, samedi, à l’Agence de presse sénégalaise (APS) abordent divers sujets se rapportant au gel de l’aide américaine, la division de l’opposition sénégalaise ou encore la sortie en salle du conte musical ‘’Birima’’ de Youssou Ndour.
Sud quotidien parle des ‘’menaces sur le processus de paix à Ziguinchor’’ suite à la décision des nouvelles autorités américaines de geler les activités de l’USAID. »Ex-combattants, les populations déplacées et autres acteurs, brutalement sevrés de l’intervention américaine en Casamance s’inquiètent et sont préoccupés par la capacité de l’Etat du Sénégal à prendre le relai de cet accompagnement dont ils étaient les bénéficiaires », écrit le journal.
Pour le journal, ‘’il reste à savoir si le plan Diomaye pour la Casamance peut être une réponse nationale ambitieuse pour combler le vide laissé par le gel de l’aide américaine’’.
‘’Suspension de l’Usaid, la société civile dans un brouillard’’, affiche à la Une WalfQuotidien. »Un lendemain sombre guette les organisations de la société civile, à cause du gel des activités de l’Usaid. Beaucoup d’entre elles risquent de disparaître à cause de leur dépendance vis-à-vis des fonds américains, si Trump décide de sa suppression », écrit Walf.
Selon L’Observateur, »l’arrêt des projets plonge les populations dans le désarroi et la détresse ». »La suspension pour 90 jours de l’aide internationale décidée par le président des Etats-Unis, Donald Trump, est un véritable coup de massue. Au Sénégal, dans certaines régions , l’arrêt des projets porte un sacré coup à leur épanouissement », écrit L’Obs.
En politique, EnQuête note qu’au Sénégal, ‘’le parti Pastef, porté par la popularité de Sonko et Diomaye, semble naviguer sans opposition significative depuis son arrivée au pouvoir, malgré quelques critiques isolées’’.
‘’L’opposition, minée par des divisions internes et des querelles d’ego, peine à se constituer en un contrepoids crédible. Malgré la récente formation du Front pour la défense de la démocratie, conduite par Khalifa Sall, elle peine à se réinventer et à proposer une alternative cohérente face à un régime Pastef en pleine ascension. Son histoire récente, marquée par des scissions et des difficultés de leadership, ajoute à la complexité de la situation’, écrit le journal.
Dans Le Quotoidien, l’opposant Thierno Alassane Sall (TAS), président du parti La République des valeurs, ‘’s’en prend à la gestion du gouvernement dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko, lors d’un live sur Facebook’’. ‘’TAS qualifie l’attelage du leader du parti Pastef de +gouvernement sans solutions+. M. Sall les invite à laisser la place aux compétents, s’ils sont +incapables de diriger ce pays+’’, écrit le quotidien.
Le Soleil met en exergue la sortie en salle du conte musical ‘’Birima’’ de Youssou Ndour et affiche à la Une »Un nectar passé sur grand écran’’.
‘’L’essentiel du tout-Dakar culturel était, le mardi 4 février, au Complexe Pathé Dakar. Au cinéma ce soir-là, la captation de +Birima+ passait en avant-première sur grand écran. Ce conte musical de grand art a été présenté en septembre 2023 sur quatre jours (du 20 au 23), au Théâtre du Châtelet de Paris (France). Idée originale de Pape Oumar Ngom et Youssou Ndour, dramaturgie et mise en scène assurées par Majaw Njaay, +Birima+ est une sublime ode à notre patrimoine culturel et à notre cher principe de vivre ensemble, mais aussi une tribune pour Youssou Ndour de rappeler qu’il reste le roi du jeu. Le film est à l’affiche pour toute cette semaine au Cinéma Pathé Dakar’’, rapporte la publication.
Dakar, 7 fév (APS) – Le mouvement Karbone-14, composé d’étudiants, d’enseignants, de chercheurs, d’artistes et de membres de la société civile, a plaidé pour l’introduction des travaux de Cheikh Anta Diop dans les curricula au Sénégal.
Dans un mémorandum dont une copie a été transmise, vendredi, à l’APS, il demande l’introduction systématique de ses travaux dans le système éducatif sénégalais, de l’école primaire aux écoles doctorales.
‘’Une telle intégration permettra aux jeunes générations d’acquérir une vision critique et enrichissante de l’histoire et des sciences africaines’’, écrit le mouvement.
Il demande également la réhabilitation de l’héritage de Cheikh Anta Diop au niveau institutionnel, exigeant que les autorités éducatives, universitaires et politiques prennent des mesures concrètes pour consacrer définitivement l’héritage de Cheikh Anta Diop décédé le 7 février 1986.
Les disciples de l’égyptologue soulignent que cela inclut la création d’espaces dédiés à son œuvre, de centres de recherche et de réflexion autour de ses théories sur l’histoire, la culture et la géopolitique africaines.
‘’La création d’un institut d’égyptologie avait été annoncée par les autorités étatiques sénégalaises, en février 2024, lors du centenaire de la naissance du professeur Diop et nous souhaitons la poursuite de ce projet’’, disent-ils, incluant dans leurs doléances la réalisation effective du musée ‘’Kër Séex Anta Jóob’’, inauguré par l’ancien Premier ministre Amadou Ba.
Le mouvement estime que le laboratoire Carbone14, l’un des plus grands héritages du professeur Cheikh Anta Diop, mérite aussi d’être revalorisé sur tous les plans avec une vision moderne.
‘’Bien que son influence sur la pensée scientifique, historique et culturelle africaine soit indéniable, sa pensée demeure méconnue et largement absente des espaces universitaires et éducatifs à travers le Sénégal et le continent africain’’, signale le mouvement Karbone-14.
Il s’engage aussi pleinement à réhabiliter la pensée de Cheikh Anta Diop ‘’pour débloquer le génie créatif qui sommeille en chaque jeune africain’’.
Le mouvement qui avait programmé une marche mercredi dernier, a dû y surseoir après des troubles survenus à l’université de Dakar.
Dakar, 6 fév (APS) – L’Institut français du Sénégal à Dakar annonce la mise en ligne, depuis mercredi dernier, d’une collection de plus de trois cent œuvres de l’artiste peintre sénégalais Mor Faye (1947-1984), »figure emblématique de l’art sénégalais », a appris, jeudi, l’APS.
‘’L’Institut français du Sénégal à Dakar, en collaboration avec le collectionneur Bara Diokhané, l’artiste Khalifa Hussein et la plateforme Kucibok a procédé à la mise en ligne de la collection Mor Faye à partir du 5 février 2025’’, indique un communiqué de presse transmis à l’APS.
Responsable du pôle image à l’Institut français du Sénégal à Dakar, Ken Aicha Sy explique que cette démarche entre dans une volonté de ‘’mettre en mouvement’’ un patrimoine immatériel et permettre aux publics de prendre connaissance du legs de ‘’cet artiste multidimensionnel’’.
L’interface, ouverte aux visiteurs, présente plus de 300 œuvres numérisées, sur la base de diapositives appartenant au collectionneur et juriste Bara Diokhané.
Selon le communiqué, ces diapositives retracent des moments forts de l’œuvre de l’artiste plasticien Mor Faye. Elles sont des témoignages visuels précieux d’une œuvre importante de l’artiste sénégalais appartenant à l’école de Dakar [un mouvement de renouveau artistique né au Sénégal à l’aube de l’indépendance entre 1960 et 1974 et encouragé par le président sénégalais].
Les initiateurs annoncent que, chaque mois, cinquante œuvres de l’artiste seront mises en ligne.
‘’Cette initiative contribue à la valorisation et à la mise en circulation du patrimoine artistique sénégalais, mais aussi à immortaliser des artistes méconnus des Sénégalais.’’
Bien que restreinte par une vie tragiquement courte, l’oeuvre de Mor Faye a marqué l’histoire de l’’’Ecole de Dakar’’, selon sa biographie.
Né en 1947 à Dakar, il appartient à la première génération d’artistes formés dans le contexte post-indépendance, alors que le Sénégal, sous la présidence de Léopold Sédar Senghor, s’affirme comme un foyer culturel de la négritude et de la modernité africaine, rappelle-t-on.
Mor Faye s’est formé à l’Ecole des beaux-arts de Dakar sous la direction de maîtres comme Iba Ndiaye, peintre et enseignant ayant participé à la création de l’établissement.
Il s’est rapidement distingué par son style singulier, mêlant abstraction, symbolisme et un usage audacieux de la couleur, selon sa biographie.
Déjà en 1966, à l’âge de 19 ans, il faisait partie des 10 artistes qui avaient représenté le Sénégal au premier Festival mondial des arts nègres.
Il meurt prématurément en 1984 à l’âge de 37 ans, laissant derrière lui une production artistique relativement restreinte mais d’une intensité remarquable.
‘’Ses œuvres continuent de fasciner les amateurs et les critiques d’art, qui voient en lui un précurseur de l’avant-garde sénégalaise et un artiste dont l’authenticité transcende les catégories stylistiques. Mor Faye est souvent perçu comme un symbole de la complexité et des tensions propres à l’art africain moderne. Son héritage invite à réfléchir sur le rôle de l’artiste dans la société, entre affirmation identitaire et quête universelle’’, lit-on dans le document.
Dakar, 6 fév (APS) – Le président de la République a demandé au ministre et au secrétaire d’Etat en charge de la Culture de préparer l’organisation d’un forum national sur le livre et la lecture, avec la participation de l’ensemble des hommes de lettres du Sénégal et de toutes les parties prenantes.
Bassirou Diomaye Faye, présidant mercredi la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, « a demandé au ministre et au secrétaire d’Etat en charge de la Culture de préparer, avec l’ensemble des hommes de lettres du Sénégal, l’organisation, en fin juin 2025, d’un forum national sur le livre et la lecture avec la participation de toutes les parties prenantes ».
Selon le compte rendu fait par le porte-parole du gouvernement, Amadou Moustapha Njekk Sarré, Bassirou Diomaye Faye salue « le travail remarquable des hommes de lettres ainsi que la vitalité de la production littéraire nationale dans tous les domaines ».
Le président Faye a rappelé au gouvernement »l’impératif de promouvoir le livre et la lecture dans le système éducatif et dans l’enseignement supérieur ».
Dans cette perspective, il a demandé au ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Culture et au secrétaire d’Etat à la Culture, en relation avec les ministres en charge de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et technique, de l’Enseignement supérieur, des Collectivités territoriales, de la Communication et du Numérique, « d’accentuer les efforts en matière de promotion du livre et de la lecture, notamment des publications nationales et africaines ».
Le chef de l’Etat, premier protecteur des Arts et des Lettres du Sénégal, a aussi souligné « l’urgence de restructurer et de renforcer le fonds d’aide à l’édition ». Ce fonds créé en 2004 et opérationnelle depuis 2009 est doté d’un budget annuel de 600 millions de FCFA.
Bassirou Diomaye Faye a par ailleurs demandé au gouvernement de développer une politique innovante de modernisation des bibliothèques et salles de lecture dans les établissements scolaires, universitaires et d’enseignement supérieur, à la lumière des opportunités et innovations du numérique favorisant l’essor du livre numérique.
Le président de la République a de même invité la tutelle à mobiliser l’assistance et les partenariats nécessaires afin de mieux accompagner les associations d’écrivains.
Il considère que « ces organisations, d’utilité publique, doivent être davantage impliquées dans la mise en œuvre des politiques publiques, notamment celles culturelles relevant de l’agenda national de transformation à l’horizon 2050 ».
Dakar, 2 fév (APS) – L’artiste plasticien Séa Diallo, figure contemporaine de l’art sénégalais, est décédé dimanche à Dakar, a-t-on appris du commissaire d’exposition Idrissa Diallo.
« C’est avec une immense tristesse que nous avons appris le décès de Séa Diallo, un grand artiste de la scène artistique sénégalaise. Sa disparition est une grosse perte », écrit le commissaire d’exposition dans un message transmis lundi à l’APS.
Selon Idrissa Diallo, le défunt « croyait profondément que l’artiste devait pouvoir vivre de son art, mais que pour cela, il devait s’organiser ».
« Il faisait partie des premiers artistes sénégalais à se formaliser en créant sa propre entreprise culturelle, ouvrant ainsi la voie à d’autres générations. Son travail artistique a toujours été guidé par une soif insatiable de recherche et d’exploration (…) », témoigne l’ancien responsable de la galerie Léopold Sédar Senghor du Village des arts.
Séa Diallo « n’a jamais connu de limites dans sa création, cherchant toujours à apprendre et à transmettre. Sa quête de connaissance l’a conduit à multiplier les formations et à enrichir continuellement sa pratique », a-t-il ajouté.
L’artiste âgé de 67 ans était pensionnaire du Village des arts, dont il était devenu premier secrétaire général avant de présider son comité de gestion, selon Zulu Mbaye, qui lui a succédé à ce poste.
Séa Diallo fut « un homme discret, humble et de contact facile qui s’est investi toute sa vie au travail de l’art », ajoute-t-il.
« C’est quelqu’un qui s’est donné corps et âme à l’art, et comme on dit, il a brûlé au feu de l’art, comme les damnés de la terre. C’est une grosse perte », insiste Zulu Mbaye, signalant qu’une délégation du Village des arts va l’accompagner à sa dernière demeure à Yoff, ce lundi.
Zulu Mbaye a aussi souligné « la fertilité » de l’artiste Séa Diallo, devenu au fil des ans un artiste polyvalent, touchant à la peinture, à la céramique, au sous-verre et à la sculpture.
Dans une exposition rétrospective intitulée « Itinérances » organisée en 2020 à la Galerie nationale d’art de Dakar, l’artiste avait partagé son travail remontant à 1989, montrant son fond d’atelier avec la série sur sa pérégrination spirituelle intitulée « Voyage soufi ». Il y avait aussi des portraits de personnes anonymes rencontrées dans la rue, ses prises de position sur les « Bêtises humaines », des portraits faits au crayon et à l’encre de Chine.
« Il était un brillant intellectuel qui parlait de tous les sujets », insiste Zulu Mbaye.
Certains de ses toiles, correspondant à la période 2003-2007, portent sur la Casamance, base d’une rébellion hostile au gouvernement sénégalais, tandis que d’autres s’inspirent du conflit sénégalo-mauritanien de 1989, des guerres en Sierra Leone, au Rwanda, en Côte d’Ivoire.
A travers ses œuvres où il a toujours célébré la femme, l’artiste s’est impliqué dans la défense des enfants, pour l’environnement, notamment la protection du lac rose. Il a de même rendu hommage aux femmes, parmi ses nombreux sujets de prédilection.
Séa Diallo disait souvent prendre position pour « réhabiliter l’homme ».
Il s’est par ailleurs essayé au journalisme avec le journal « Taxaaw », fondé par le professeur Cheikh Anta Diop (1923-1986), et au sein du quotidien « Le Soleil », où il a signé beaucoup de textes engagés, a fait savoir le journaliste et critique d’art Massamba Mbaye.
« Son texte intitulé +Centre de formation artisanale ou centre de formation au chômage+, paru dans Taxaaw en 1976, lui a valu son exclusion de cette institution, malgré son relatif anonymat », rappelle Mbaye.
Dakar, 31 jan (APS) – Paulin Soumanou Vieyra, premier cinéaste d’Afrique noire, historien et critique de cinéma dont on célèbre le centenaire de sa naissance, vendredi, mérite la reconnaissance de l’Etat sénégalais pour tout ce qu’il a fait pour le cinéma, estime le réalisateur Clarence Delgado.
»Paulin a beaucoup fait pour le cinéma sénégalais et africain. On ne lui a jamais rendu hommage en reconnaissant ce qu’il a fait pour le 7e art et cela me hante, connaissant Paulin et ce qu’il a fait pour le cinéma », a déclaré Clarence Delgado dans un entretien accordé à l’APS.
Né le 31 janvier 1925 à Porto-Novo, au Dahomey, l’actuel Bénin, Paulin Soumanou Vieyra, cinéaste, critique et historien du cinéma d’Afrique noire, a été naturalisé sénégalais. Décédé le 4 novembre 1987 à Paris, il a été enterré à Dakar.
Paulin Soumanou Vieyra a signé les premiers textes africains de critique cinématographique et a publié plusieurs ouvrages, dont »Le cinéma africain: des origines à 1973 » (1975) et »Le cinéma au Sénégal » (1983).
De 1956 à 1975, Paulin Soumanou Vieyra dirigeait le service des actualités de l’Afrique-Occidentale française, celui des actualités sénégalaises ensuite. À ce titre, il est témoin et gardien de la mémoire visuelle de l’époque. On lui doit les images d’archives des cérémonies officielles de l’accession de plusieurs pays africains à l’indépendance.
Premier directeur des programmes de l’Office de radiodiffusion télévision du Sénégal, devenu la RTS dans les années 1970, il fonde la télévision nationale sénégalaise avant de devenir enseignant au Centre d’études des sciences et techniques de l’information de Dakar.
Clarence Delgado rappelle que c’est dans la discrétion que Vieyra dont le bureau n’était jamais fermé, recevait les gens pour les aider à avoir des pellicules pour tourner leurs films qu’il développe pour le compte des Actualités sénégalaises.
»Il a fait cela dans la discrétion, mais les gens ne l’ont pas reconnu, et c’est ce qui me gêne un peu. Dans le cinéma sénégalais, on n’a pas reconnu le bienfait de Vieyra, un homme humainement bien pour qui j’avais beaucoup de respect », a-t-il insisté.
Selon Delgado, le théoricien du cinéma défendait tout temps et partout dans le monde les cinémas africains, mais malheureusement, fustige t-il, »les Sénégalais et autres Africains ne lui ont pas rendu la pièce de sa monnaie ».
»Il s’est battu au sein des instances. Lors des réunions, il défendait toujours le point de vue des cinémas d’Afrique subsaharienne en général et sénégalais en particulier. Il avait un carnet d’adresses. Il était tout le temps invité pour parler du cinéma africain. C’est pour cela qu’il a fait beaucoup de choses pour le cinéma africain », rappelle le réalisateur du film »Au nom du père » (2023), sur l’apport du pionnier Vieyra.
Clarence Delgado invite à »reconnaitre » le travail de Paulin Soumanou Vieyra, un »intellectuel au vrai sens du mot » qui, selon lui, »aimait partager et échanger » avec les cinéastes et autres.
Le premier assistant de Sembene Ousmane rappelle également que le réalisateur de »Afrique sur seine » savait gérer les égos dans le milieu du 7e art où les acteurs étaient »très susceptibles ».
»Il faisait attention à la susceptibilité des gens. Parce que, nous, on est susceptibles dans ce métier. Dès qu’on critique ton film, tu penses que le gars est ton ennemi. (…). Il avait beaucoup de pressions dans le monde du cinéma sénégalais en tant que critique de cinéma », indique t-il.
Delgado rappelle avoir connu Paulin Soumanou Vieyra à l’ambassade du Sénégal à Alger en marge du premier congrès de la Fédération panafricaine des cinéastes (Fepaci) en 1969.
Son oncle, un diplomate avait reçu Vieyra, Ababacar Samb Makharam, Johnson Traoré, pour échanger des stratégies de diplomatie.
C’est après son retour au Portugal où il est allé approfondir ses connaissances en cinéma après ses études à Alger, que Delgado fut présenté à Sembène Ousmane.
»C’est Paulin S. Vieyra que j’ai connu en premier. J’étais super sympa avec lui et c’est Paulin alors directeur des actualités qui m’a présenté à Sembene Ousmane. Il m’a pris par la main et il est parti voir Sembene vu leur relation et c’est là que j’ai sympathisé avec Sembene Ousmane », se remémore Clarence Delgado.
Sa relation avec »L’Ainé des anciens » s’est fortifiée au fil des ans passant de sympathisants à collaborateurs pour devenir finalement une relation filiale entre »père et fils ».
Selon lui, le lien qui unissait Paulin Soumanou Vieyra et Ousmane Sembene va au-delà du travail professionnel car, Sembene Ousmane passait tous les réveillons du 25 décembre chez Paulin Soumanou Vieyra, à la Patte d’Oie.
Paulin Soumanou Vieyra a à son actif, une trentaine de films, en majorité, des courts métrages documentaires et des ouvrages dont le livre »Le cinéma africain: des origines à 1973 », publié en 1975 par la maison d’éditions »Présence africaine » qui a permis de documenter très tôt les cinémas africains.
Dakar, 31 jan (APS)- Le réalisateur et producteur béninois d’origine et sénégalais d’adoption, Paulin Soumanou Vieyra décédé il y a 38 ans à l’âge de 62 ans et dont on célèbre cette année le centenaire de la naissance, est le concepteur d’une nouvelle écriture documentaire, a déclaré le critique sénégalais Baba Diop.
‘’Il a eu un regard nouveau sur le documentaire différent de la méthode classique, c’est lui le concepteur d’une nouvelle écriture du documentaire’’, dit-il dans un entretien accordé à l’APS.
Il estime par ailleurs que Paulin Soumanou Vieyra a ouvert le chemin sur une nouvelle forme avec sa série de documentaires »1 minute, un film ».
Selon le journaliste formateur, cette technique du « 1mn, un film » devrait être enseignée aujourd’hui avec les nouvelles technologies.
Le réalisateur Paulin Soumanou Vieyra, ajoute M. Diop, a posé le premier jalon de notre visage du documentaire avec son premier film de fin de formation ‘’C’était il y a quatre ans’’, un court métrage de 5 minutes réalisé en 1954 et qui raconte la nostalgie d’un étudiant africain à Paris.
Ce film qui a fait scandale à sa sortie parce que contenant une scène jugé ‘’subversive’’, montre un plan où le quotidien français ‘’L’humanité’’ est posé sur une chaise alors que le journal ‘’Le monde’’ est à terre.
‘’En refusant de couper le plan, Vieyra campait déjà aussi sur sa foi en la liberté d’expression dont le cinéma devrait être la traduction et son choix pour un cinéma engagé, témoin de l’histoire et reflétant les réalités au quotidien’’, avait écrit le critique burkinabé Clément Tapsoba dans un portait intitulé « Portrait de Paulin S. Vieyra (1925-1987) : l’homme à la casquette » dans l’ouvrage ‘’Afriques 50 : Singularités d’un cinéma pluriel’’ paru en 2005 chez ‘’L’Harmattan Paris’’.
Vieyra réalise à Paris en 1955 ‘’Afrique sur seine’’ avec ses compatriotes Mamadou Sarr (scénario et coréalisateur), Jacques Mélo Kane (caméra), Robert Garistan (directeur de photo) qui relate le quotidien des Noirs, des Sénégalais en particulier et d’Africains en général.
Ce film d’une durée de 21 minutes, en noir et blanc, marquant la naissance du cinéma en Afrique noire montre des étudiants, artistes pour la plupart, vivant à Paris, friands et nostalgiques de leur culture. Ils sont dans des endroits qu’ils fréquentent souvent : rencontre au quartier latin, soirées dansantes.
Il pose les interrogations de ces étudiants, sur leur identité, leur civilisation, leur culture et leur avenir. Une voix off se demande si l’Afrique est-elle seulement en Afrique ou au bord de la Seine ?
Baba Diop rappelle qu’il était interdit à l’époque aux Africains de filmer l’Afrique, d’où la réalisation du film à Paris.
Ce film, souligne le critique français Olivier Barlet, est ‘’un manifeste pour un certain type de positionnement’’, décrivant Vieyra comme ‘’un homme de Senghor’’ le président poète Léopold Sédar Senghor.
‘’Il n’était pas révolutionnaire, c’était une option différente de celle de Sembene Ousmane avec qui, il s’entendait bien’’, indique Barlet qui souligne ‘’la mise en place par Paulin Soumanou Vieyra d’une certaine vision du cinéma qui est d’exigence, d’égalité entre les hommes’’.
Le directeur des ‘’Actualités sénégalaises’’ réalisera beaucoup d’autres films en Afrique dont ‘’Une nation est née’’, un documentaire de 25 minutes réalisé en 1961 qui met en lumière le cheminement du Sénégal, de la colonisation à la souveraineté nationale, ‘’de façon allégorique’’.
Vieyra tourne en 1981 le documentaire ‘’L’envers du décors’’ un making-off sur le film ‘’Ceddo’’ de Sembene Ousmane et surtout montre comment travaillait ce dernier.
Il y a aussi son seul long métrage de plus d’une heure (100 minutes) ‘’En résidence surveillée’’, un film politique réalisé en 1981 et qui fait état de la gestion des pays africains post indépendance.
Son film ‘’Môl’’ (1966) un docu-fiction ‘’visionnaire’’ montre déjà les difficultés de la pêche, la raréfaction des poissons à cause des grands chalutiers et surtout les faibles moyens des pêcheurs sénégalais, des difficultés qui se posent aujourd’hui encore.
L’histoire du film tourné à Kayar, Saint-Louis et Dakar raconte la vie d’un jeune pêcheur de Kayar, conscient qu’il ne peut pas vivre de son travail avec une pirogue sans moteur, décide de se mettre à l’heure de la modernité.
Les réalités africaines sont prises en compte, car avant de prendre sa décision, il demande la permission aux génies et à son oncle maternel de Saint-Louis, ‘’un geste bien africain que l’on a tendance à perdre de nos jours’’, analyse le critique.
Pour le journaliste Baba Diop, son film ‘’Lamb’’ (1963) ‘’très pédagogique’’ met en exergue un sport national bien sénégalais très prisé (rappelant la lutte gréco-romaine) qui n’a pas été importé, une forme de lutte traditionnelle avec ses pratiques que le monde de la lutte gagnerait à connaitre.
‘’Lamb’’ sera sélectionné dans la compétition officielle court métrage au festival international de Cannes (France) en 1964. Il a été restauré en 2014 et montré à Cannes la même année.
L’universitaire et critique de cinéma sénégalais, Thierno Ibrahima Dia, estime que Paulin a aussi fait un clin d’œil à la fiction, des films pleins d’humour tels que ‘’La bicyclette’’ (1967), ‘’Le gâteau’’ (1967), ‘’Rendez-vous’’ (1967).
Au total, il réalisera 32 films dont un seul long métrage fiction. Certaines de ces réalisations seront restaurées cette année dans le cadre de la célébration de son centenaire, selon son fils Stéphane Vieyra, président de l’Association PSV/films, chargé de promouvoir l’œuvre de Paulin Soumanou Vieyra.
Dakar, 31 (APS) – L’historien, critique de cinéma, producteur et réalisateur bénino-sénégalais, Paulin Soumanou Vieyra (1925-1987), dont on célèbre ce vendredi 31 janvier le centenaire de sa naissance a su très tôt l’importance de ‘’figer cette extraordinaire mémoire des cinémas africains’’, a indiqué à l’APS l’universitaire et critique de cinéma sénégalais, Thierno Ibrahima Dia.
Natif de Porto-Novo au Dahomey l’actuel Bénin, Vieyra devenu citoyen sénégalais, est reconnu comme le premier critique et historien du cinéma africain, selon M. Dia, relevant qu’il a permis de documenter très tôt les cinémas africains à travers son ouvrage ‘’unique’’ en son genre intitulé ‘’Le cinéma africain : des origines à 1973’’ publié en 1975 par la maison d’éditions ‘’Présence africaine’’.
L’auteur, premier africain à avoir étudié le cinéma, anthropologue visuel formé par Jean Rouch [réalisateur et anthropologue français] est aussi un chercheur et historien qui, en tant que témoin et artisan a donné une information quasi exhaustive sur les films de tous les pays d’Afrique, y compris le Maghreb ainsi qu’une réflexion sur la situation, les problèmes et la défense de l’art et de l’industrie cinématographique, lit-on d’ailleurs sur la note de présentation de cette publication.
Selon Thierno Ibrahima Dia, enseignant de cinéma à l’université Bordeaux-Montaigne, par ailleurs rédacteur en chef du magazine ‘’Africiné’’ dédié exclusivement aux cinémas africains, »’ce livre est une ressource unique pour comprendre et embrasser les cinémas africains’’.
Paulin Soumanou Vieyra, estime-t-il, a ouvert toute une voie que les critiques africains et le magazine »Africiné », basé à Dakar, cherchent à poursuivre et à consolider, en s’appuyant sur ses travaux qui sont »essentiels ».
‘’Pour tous ceux qui s’intéressent au cinéma, chercheurs, critiques et journalistes, Vieyra est inspirant et son œuvre est éternel’’, souligne-t-il, regrettant toutefois qu’il ne soit pas assez connu par le grand public malgré ‘’son travail extraordinaire, essentiel et unique’’.
Le film »En résidence surveillée » (1981) avec l’acteur Douta Seck et Paulin Soumanou Vieyra.
Après son film de fin d’études réalisé en 1954, intitulé ‘’C’était il y a quatre ans’’, qui a fait scandale parce que contenant une scène jugé ‘’subversive’’, Paulin Soumanou Vieyra tourne avec d’autres étudiants africains Mamadou Sarr (coréalisateur), Jacques Mélo Kane (directeur de photo) et Robert Caristan (caméraman) le premier film du continent intitulé ‘’Afrique-sur-Seine’’.
Ce court métrage en noir et blanc de 22 minutes, jugé ‘’culte’’, parle de la vie des Africains émigrés à Paris dans les années 1950, marque ainsi la naissance du cinéma en Afrique subsaharienne.
Panafricaniste convaincu et militant engagé
Thierno Ibrahima Dia souligne par ailleurs l’apport de Vieyra, qui au-delà du théoricien qu’il a été, a su accompagner les talents cinéastes africains aussi à travers la naissance de la Fédération panafricaine des cinéastes (Fepaci) et lors des formations données à Dakar. Il était le mentor de nombreux réalisateurs dont Flora Gomes de la Guinée-Bissau, Djibril Diop Mambety, Ababacar Samb Makharam, Clarence Delgado du Sénégal, entre autres.
Directeur du service ‘’Actualités de l’AOF [Afrique occidentale française] » de 1956 à 1960 puis du Sénégal indépendant de 1960 à 1975 à la demande du poète président Léopold Sédar Senghor, Paulin Soumanou Vieyra a développé toute une activité de diffusion du cinéma africain et accompagné les cinéastes de l’époque et précisément Sembene Ousmane.
‘’En tant que directeur du service Actualités sénégalaises [Chargées de filmer toutes les sorties et déplacement du président de la République au Sénégal et dans le monde], il disposait de moyens techniques. Lorsque que Sembene est revenu de Moscou avec une vieille caméra américaine pour faire ‘’Borom Sarret’ sorti en 1963, Vieyra a mis à sa disposition le matériel technique des actualités sénégalaises’’, raconte Thierno Ibrahima Dia.
Il fait savoir que par la suite, Paulin Soumanou Vieyra, de manière plus officielle, sera le directeur de production de Sembene, ce qui a permis à ce dernier de se libérer de la production et de se consacrer à la création.
Paulin Soumanou Vieyra en tournage.
Il est, selon lui, l’un des moteurs de la Fepaci qui regroupe les réalisateurs africains depuis son lancement en 1969 lors du festival culturel panafricain d’Alger sous l’égide de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA). Le réalisateur sénégalais Ababacar Samb Makharam fut le premier secrétaire général de la Fepaci.
‘’Il pèsera de tout son poids avec Ababacar Samb Makharam pour une démarche panafricaine qui inclue toute l’Afrique depuis l’Egypte jusqu’à l’Afrique du Sud, la partie francophone et ceci a permis une identité panafricaine’’, explique Thierno Ibrahima Dia.
Selon lui, Vieyra est un ‘’personnage essentiel pour Sembene, pour le cinéma sénégalais voire africain’’, car estime-t-il, ‘’si aujourd’hui des réalisateurs comme les Tunisiens Tahar Cheriaa (1927-2010), fondateur des Journées cinématographiques de Carthage et son descendant Mohamed Challouf, se retrouvent dans cet héritage, c’est grâce à ce travail ».
Pour sa part, le doyen des cinéastes sénégalais, le réalisateur Ben Diogoye Bèye, retient de Paulin Soumanou Vieyra, ‘’un homme pas très bavard, conscient de sa mission de fonctionnaire de l’Etat, travailleur, posé, social et amusant’’.
Le fait que Vieyra ne soit pas bien connu du grand public se justifie par son statut de fonctionnaire. Il n’a pas pu se libérer qu’après sa retraite, relève-t-il.
Membre de l’association des cinéastes sénégalais associés ‘’Cineseas’’, Vieyra était un homme de conciliation qui tempérait les ardeurs, selon le doyen Bèye qui fait savoir qu’il a formé beaucoup de réalisateurs et techniciens sénégalais, bissau-guinéens, entre autres.
Le film de fin d’études de l’Idhec
Inscrit en biologie, Vieyra va finalement faire du cinéma à l’IDHEC
Paulin Soumanou Vieyra a quitté son pays natal à l’âge de 10 ans pour poursuivre ses études secondaires dans un internat et s’inscrit ensuite à l’université de Paris pour commencer des études de biologie.
‘’C’est par hasard, alors qu’on cherche un extra pour jouer le rôle d’un tirailleur sénégalais dans +Le diable au corps+ (1947), film de Claude Autant-Lara avec Micheline Presle et Gérard Philippe, qu’il accède au monde du cinéma’’, raconte l’écrivaine Françoise Pfaff dans son texte intitulé ‘’Paulin Soumanou Vieyra, pionnier de la critique et de la théorie du cinéma africain’’.
Le document est paru dans un ouvrage collectif de la revue ‘’Présence Africaine’’ publié en 2005 et consacré au ‘’Cinquantenaire de cinéma africain: hommage à Paulin Soumanou Vieyra’’.
Premier africain diplômé de l’IDHEC (l’institut français des hautes études cinématographiques qui est aujourd’hui la Femis) qu’il a intégré en 1952, Vieyra en ressort comme réalisateur, régisseur et producteur. Il aura à son actif 32 films composés pour la plupart de courts métrages documentaires et fictions et un seul long métrage intitulé »En résidence surveillée » réalisé en 1981 et qui parle des premiers dirigeants de l’Afrique indépendante.
»Je garde à l’esprit un homme cordial, généreux, lucide, intègre, au savoir tranquille et méthodique (attribuable à sa formation scientifique ?), qui savait aussi manier l’humour », a témoigné l’écrivaine française d’origine guadeloupéenne.
Elle y ajoute que Vieyra a été ‘’un Témoin attentif de la naissance et de l’évolution du cinéma subsaharien, ses écrits fournissent aux historiens et aux critiques de précieux documents de recherche’’.
Premier directeur des programmes de l’ORTS devenue RTS
Décédé il y a 38 ans, il a été aussi témoin de la mémoire visuelle du Sénégal et de l’Afrique en tant que directeur des ‘’Actualités sénégalaises’’ de 1960 à 1975 suivant partout dans tous ses déplacements le président Senghor qui avait fait appel à lui pour fixer la mémoire des jeunes pays indépendants du continent.
Ces images, selon Ben Diogoye Bèye, étaient diffusées avant chaque projection de films dans les salles de cinéma.
Le reporter Vieyra prendra ensuite la direction des programmes de la télévision sénégalaise naissante et devient ainsi le premier directeur des programmes de l’ORTS.
Dans sa biographie, on lui attribue la mise en place des premières structures de cette télévision qui est devenue aujourd’hui la Radiodiffusion télévision sénégalaise (RTS).
Ses dernières années furent consacrées à la transmission de son savoir aux jeunes générations au Centre d’études supérieures des techniques de l’information (CESTI) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar où il a enseigné jusqu’à sa mort.
Il est décédé le 4 novembre 1987 à Paris et enterré au cimetière catholique de Bel Air à Dakar où repose aussi son épouse, l’écrivaine et poétesse guadeloupéenne, Myriam Warner-Vieyra qui a été bibliothécaire à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Dakar, 26 jan (APS) – Les paris sur les matchs de football ou sur les combats de lutte sont à l’origine des violences dans les stades et en général dans le sport, a estimé l’expert en cybersécurité et cybercriminalité, Ahmadou Bamba Thiam.
»L’une des causes principales de la violence dans les stades et précisément dans le sport en général est dûe au fait que beaucoup de sympathisants, des supporters font des paris sur l’issue heureuse ou malheureuse des matchs », a-t-il déclaré.
Il faisait une présentation sur le phénomène des jeux de hasard aggravés par les machines à sous dans les quartiers et sur internet, samedi, lors de la cérémonie de dédicace de l’ouvrage »La folie des jeux d’argent » du journaliste écrivain Pape Samba Kane.
M. Thiam qui sensibilise souvent les jeunes dans les écoles sur des dangers qui peuvent provenir »d’une utilisation irresponsable des réseaux sociaux » souligne que »l’issue des paris sportifs est un gain d’argent ».
»Vous savez que souvent, il arrive que des incidents se produisent dans un stade. Les gens disent que ce sont deux groupes, que ce soit la lutte, ou le football. Mais les gens qui caillassent le stade, qui se jettent des pierres, qui commettent la violence en résumé, ce sont des gens qui ne sont pas du quartier et qui ont parié et perdu », explique M. Thiam.
Selon lui, il existe beaucoup d’autres jeux illégaux qui ne se passent pas dans les casinos ou dans les paris classiques.
Ahmadou Bamba Thiam signale que l’explosion des nouvelles technologies de l’information et de la communication, la décentralisation à grande échelle des jeux et les offres alléchantes et gratuites, attisent la flamme des parieurs qui tombent dans »un rituel ».
Le phénomène touche, selon lui, tous les pays de la sous-région après avoir fait beaucoup de victimes en Afrique centrale.
Pour le formateur en cybersécurité et cybercriminalité, »les médias ont leur part de responsabilité dans ce phénomène », car dit-il, »80% des publicités passent par les radios et les télévisions locales ».
»C’est un business très lucratif », indique-t-il, pointant du doigt aussi les célébrités, footballeurs, chanteurs et autres artistes qui véhiculent les publicités sur les jeux de hasard.
»Malheureusement pour nous, l’Etat ne mesure pas les conséquences économiques, sanitaires, sociales sur ces jeux en ligne et ces canaux de transfert d’argent soumis à des taxes », regrette M. Thiam.
Il estime que le livre de Pape Samba Kane »La folie des jeux d’argent » sorti le 5 décembre dernier chez la maison d’éditions sénégalaise »Moukat », pointe du doigt un problème qui, si l’on n’y prend pas garde, risque d’être »un problème de sécurité publique.
Dakar, 27 jan (APS) – Le journaliste-écrivain Pape Samba Kane alerte sur les ravages causés par l’addiction aux machines à sous, devenues »un véritable problème de santé publique », dans son ouvrage intitulé »La folie des jeux d’argent » (Moukat éditions) présenté, samedi, à l’espace Maam Samba à Ngor.
»Absolument ! C’est vraiment alerter aujourd’hui sur la dangerosité de cette drogue, alerter les autorités, alerter les familles, alerter les victimes elles-mêmes », a-t-il dit lors de la cérémonie.
»La folie des jeux d’argent » est une réédition d’un premier ouvrage intitulé »Casinos et machines à sous au Sénégal : le poker menteur des hommes politiques » publié en 2006. Dans cette nouvelle publication, Pape Samba Kane va au-delà des casinos avec ces jeux d’argent électroniques, »pari sportifs, one X bet » et autres qui, selon lui, portent les mêmes dangers rendus plus pernicieux parce que massivement plus répandus que les casinos.
Au fil des 210 pages, l’auteur édifie sur le fléau de ces jeux, »une tragédie pour la jeunesse », »des tueurs silencieux », »une arme d’autodestruction sournoise ».
»Les petits téléphones cellulaires, déjà pas très innocents entre les mains de nos enfants jour et nuit, sont devenus des casinos portables à pleins temps 24heures sur 24, 7 jours sur 7. On joue partout, en train, en bus, en taxi, sur son lit, la nuit, au réveil, et même en classe », note-t-il.
Il en appelle à la responsabilité de l’Etat pour réguler cette pratiques des jeux d’argent, protéger la population surtout les jeunes et l’économie aussi, car pour lui, »c’est une véritable machine de fraude fiscale ».
»L’Etat a intérêt à réguler cette histoire des jeux. Il y a urgence à régler cette question. Il faut limiter les propositions des jeux, il faut prendre des dispositions législatives, supprimer les boutiques, avoir une fiscalité spéciale et lourde, car ces opérateurs ont leur serveur dans des paradis fiscaux », indique le journaliste écrivain invitant les autorités à s’inspirer des pays ayant su réguler ce phénomène.
Saluant »une enquête fouillée et référenciée », un »puissant instrument d’alerte », le critique littéraire Khalifa Touré estime pour sa part que ce phénomène des jeux d’argent est un »attentat à la santé morale ».
»Le livre de Pape Samba Kane nous fend le cœur, parce qu’il touche du doigt une maladie presque intouchable qui est en train de détruire la société sénégalaise à travers sa jeunesse qui est dans l’insouciance, inconscience avec la complicité d’organisations qui sont derrières », dit-il.
Qualifiant l’ouvrage de »chef-d’œuvre », Touré estime que l’auteur a abordé le sujet sous l’angle de la psychologie et de la psychiatrie dans une enquête journalistique.
»C’est une gageure sur le plan journalistique d’aborder les faits et en même temps de les approfondir et d’entrer dans les méandres de l’esprit humain et il l’a réussi », s’est-il félicité.